On nous demande souvent pourquoi il faut emmener son animal chez son vétérinaire tous les ans. « Docteure, mon animal est en santé, ce n’est pas nécessaire! » Sachez que votre vétérinaire sera la première à se réjouir de faire le même constat que vous, après l’avoir examiné!
La médecine est complexe parce que plusieurs systèmes sont reliés entre eux… et aussi parce que les animaux sont de parfaits cachottiers. Ils rechignent à présenter clairement leurs symptômes. Il n’est pas rare qu’un cas présenté pour « multiples vomissements » soit en fait de la toux, qu’une « plaie sous l’œil » soit en réalité une maladie parodontale avancée avec abcès dentaire, ou qu’une constipation soit en fait un problème urinaire… bref, il y a matière à confusion. La prise en charge d’un diagnostic médical est comme un casse-tête : on n’a le résultat final que quand on a assemblé toutes les pièces! Je dirais que l’anamnèse (description des faits par le client) compte pour une bonne partie de l’information, l’examen physique général une autre bonne proportion, les résultats des tests diagnostiques aussi et il reste un pourcentage qui relève de l’expérience et des compétences particulières de votre médecin vétérinaire.
L’examen annuel en 10 points
1. Yeux : Il faut évidemment s’assurer que l’œil est exempt d’infection, de corps étrangers ou de maladie. C’est surtout important plus les animaux qui avancent en âge. Certains changements du cristallin sont le signe du temps qui passe (comme nos cheveux blancs ou nos rides) alors que d’autres sont totalement anormaux (cataractes par exemple) et vont nécessiter une référence chez l’ophtalmologiste. Il n’est pas rare que nous annoncions en examen qu’un œil est non visuel et que le client ne l’avait pas remarqué. Certaines trouvailles sont le reflet d’une maladie systémique qu’il faudra investiguer plus en profondeur.
2. Gueule : Il faut examiner l’état des dents et des muqueuses. Il y a tant de douleur dentaire chez nos animaux, ça me brise le cœur. Certains humains vont sursauter juste quand un breuvage froid touche leur gencive… Pourtant, beaucoup de chiens et chats présentent de multiples abcès dentaires et saignent de la gueule à chaque repas. Ils continuent de manger grâce à leur instinct de survie. Il faut que le vétérinaire se fasse la voix de l’animal et montre les lésions à l’humain. Il y a aussi plusieurs maladies systémiques qui prennent origine de la bouche…
3. Oreilles : Il faut s’assurer que les oreilles sont propres, exemptes d’infection aussi. C’est une cause très fréquente de consultation et parfois, les otites chroniques sont moins évidentes qu’une otite aiguë et peuvent même passer inaperçues pour le propriétaire. C’est toujours important de faire une cytologie en clinique pour vérifier de quel type d’otite il s’agit : fongique, bactérienne, mixte, inflammatoire… Une otite peut ressembler à l’otite précédente, mais être causée par un microbe différent, qui se traite avec un produit différent. Il n’y a pas de produit miracle! Il est aussi très important de vérifier l’intégrité du tympan avant de mettre des gouttes dans les oreilles, car certaines sont à proscrire en cas de rupture du tympan.
4. Palpation du corps : On vérifie l’état de chair de l’animal – la grande majorité de nos patients sont en surpoids ou carrément obèses. Le surpoids peut aussi être le signe d’une maladie systémique comme l’hypothyroïdie par exemple. Une perte de poids depuis la visite précédente peut aussi être révélatrice d’un problème de santé. On tâte aussi ses ganglions un peu partout (cou, aisselles, aines, genoux).
5. Auscultation : On s’assure que le cœur et les poumons de votre animal ne présentent pas d’anomalies. En cas de souffle cardiaque, une imagerie médicale par un cardiologue sera recommandée. Si des bruits anormaux sont entendus aux poumons, des radiographies thoraciques seront nécessaires.
6. Peau et pelage: Cette partie de l’examen permet de s’assurer que l’animal n’a pas de problème dermatologique, de parasites aussi. Plusieurs animaux ont des troubles allergiques et leur peau sera anormale, leur pelage sera sec, terne et cassant.
7. Palpation du ventre: On examine alors la vessie, les intestins, on palpe les reins et on s’assure qu’il n’y a pas de masse. Si on trouve qu’un organe est anormalement gros, ou qu’on trouve une masse suspecte, il faudra faire une imagerie médicale pour identifier la nature du problème et compléter notre analyse avec des tests sanguins ou une analyse urinaire.
8. Parties génitales :Il faut examiner l’état des organes génitaux externes et de l’anus. Cette portion de l’examen est surtout cruciale chez les animaux non stérilisés, car ils sont plus à risque de présenter certains cancers. Les chiens mâles qui ont une prostate, donc tous les chiens mâles (!) devraient avoir un examen de la prostate… oui, ça se fait comme chez l’humain 😉
9. Le squelette : La palpation des articulations et des os votre animal permet d’en apprendre sur la santé musculo-squelettique. Puisque nos amis poilus vivent de plus en plus vieux, ils sont aux prises avec de l’arthrose, sans compter les blessures qui peuvent survenir au cours de leur vie, comme des déchirures ligamentaires qui vont précipiter l’arthrose.
10. Observation générale: Observer votre animal et son interaction avec les autres animaux et avec les humains permet à votre vétérinaire d’en apprendre sur sa santé globale, et sur son comportement aussi.
L’un des principaux messages à retenir est qu’en tant que généralistes, on doit toujours se faire une vue d’ensemble de votre animal et du problème avant de se faire une idée, de proposer des tests et donc de poser un diagnostic.
Pour (ré)écouter ma chronique sur le sujet, au micro de Geneviève Pettersen, c’est ici :
Elle signe ce texte
Fondatrice du magazine web Flair & Cie, Dre Lucie Hénault est médecin vétérinaire et propriétaire avec 5 associées, de 6 établissements vétérinaires dans la grande région de Montréal. Dre Hénault est gestionnaire de l’Hôpital vétérinaire de Montréal, à Westmount.