Retour

Merci à ma maman, qui m’a permis d’aimer les animaux.

Flair animal / Cohabiter au quotidien / Tranches de vie / Merci à ma maman, qui m’a permis d’aimer les animaux.

En ce merveilleux week-end qui souligne le grand cœur des mamans, et ce même si j’écris sur une page dédiée aux amoureux des animaux, je veux remercier ma maman… qui n’aimait pas les animaux.

Aînée d’une famille de 10 enfants où il n’y avait aucune place pour un animal de compagnie, ma mère qui est née pendant la 2e guerre mondiale, avait de nombreuses tâches quotidiennes. Fille aînée, elle est aussi rapidement devenue la 2e maman de ses frères et sœurs. Toute jeune, elle a aussi pratiqué quelques années le métier d’enseignante où son instinct maternel était mis à profit. 

Elle a rencontré mon papa dans la jeune vingtaine. Mon père avait pris la relève de la ferme de mon grand-père. Comme mes parents habitaient à 300 km l’un de l’autre pendant qu’ils se fréquentaient, ma maman ne pouvait pas tout à fait imaginer quel serait son quotidien sur une ferme, une fois mariée. Quand on ne connaît pas les animaux, on ne les trouve pas toujours mignons. Une vache c’est gros, un cochon c’est sale, plusieurs familles de chats dans une étable c’est encombrant. Pauvre petite maman.  Pendant les premières années de vie à la ferme elle a eu peur à plusieurs occasions, surtout quand mon père lui demandait de ne pas laisser passer une vache qui ne voulait pas se placer au bon endroit dans l’étable. Difficile de paraître brave devant une bête si grosse. Malgré tout elle essayait. Elle levait les bras, tentait de l’effrayer mais avait bien souvent beaucoup plus peur que l’animal qui semblait ne pas comprendre.   Pauvre maman, mais aussi pauvre papa! Il ne devait pas se fâcher, mais il ne devait pas rire non plus. Elle a dû combattre ses peurs et après beaucoup d’efforts elle est devenue son bras droit à l’étable. Elle a toutefois établi ses limites et mon père les a respectées. 

Je parle de ma mère parce qu’elle a apprivoisé un peu ses peurs, mais elle n’a jamais développé l’amour des animaux. En tout cas pas l’amour avec un grand A que je pense qu’il faut avoir pour être vétérinaire. Mon père avait cet amour. Il se levait la nuit pour aller surveiller un vêlage ou pour une vache qui l’inquiétait. Il manquait des rencontres importantes pour s’occuper de ses animaux. Il caressait les petites poules qui venaient se percher près de sa tête pendant la traite des vaches. Mon papa m’a appris tout ça. 

Ma mère quant à elle m’a appris d’autres choses tout aussi importantes. Elle m’a appris le respect et la tolérance et c’est en montrant l’exemple qu’elle a été une merveilleuse professeure. Elle ne m’a jamais dit qu’un chat c’est juste un chat, quand je faisais tout pour retrouver la portée d’une chatte qui avait perdu son gros ventre. Elle n’a pas réagi de façon exagérée quand j’ai rapporté un chiot de l’école, tout heureuse de l’avoir gagné lors d’un tirage. Elle m’a très souvent laissée me faufiler par la porte arrière pour aller aider à l’étable, plutôt que faire le ménage. 

À la ferme, nous avons eu des chèvres, un cheval, plusieurs chiens, des poules, des oies, des pintades et tellement de chats! Mais une entente était très claire entre mes parents; aucun n’entrait dans la maison. Les chatons retrouvés dormaient dans une belle petite boîte au chaud à l’étable, le petit chiot trouvait sa place avec le plus vieux sur la paille, au travers des petits veaux. 

J’ai eu une enfance heureuse grâce à cette adorable maman. Elle a toujours respecté ce que je suis même si elle ne comprenait pas toujours ce qui me guide encore aujourd’hui. J’ai ainsi appris à comprendre plusieurs mamans qui viennent à la clinique avec leur animal. Elles souhaitent le faire soigner par amour pour leur enfant et je les trouve extraordinaires. Elles ont accepté qu’un animal entre dans la vie de la famille et elles subissent bien malgré elles les côtés un peu négatifs de sa présence. Pourtant, elles trouvent du temps pour venir me voir et faire soigner cet ami poilu qu’elles comprennent mal. Ce qui est important pour elle c’est l’amour qu’elles ont pour leur enfant. Un cœur de maman c’est tellement grand!

Elle signe ce texte

Dre Élise Coutu est médecin vétérinaire, propriétaire de la Clinique vétérinaire du compagnon à Sainte-Marie, en Beauce.